Église d’occasion, car nous ne sommes pas tout neufs, nous avons un passé fait d’imperfections, de blessures, d’accidents mais aussi de grandeurs, de services, de fidélité que nous ne saurions méconnaître si nous voulons témoigner aujourd’hui. Une « Église d’occasion » redécouvre sans cesse les richesses de sa propre tradition, les approfondit, les reformule, les réoriente. Qu’est-ce qu’une innovation qui se tiendrait à distance de la tradition, sans oser y mettre la main, y puiser de quoi réinventer et anticiper les réformes ?
Église d’occasion, dans le sens où pour annoncer l’Évangile nous nous efforçons de saisir les occasions favorables offertes, au seuil, en résonance avec ce qui se vit à l’occasion d’un événement social, national, local, familial. Ces « occasions » sont aussi certains moments de nos vies, heureux ou difficiles, où nous faisons de la place à d’autres, à un Autre pour se questionner, se ressourcer, se réorienter.
Trois occasions se posent, voire s’imposent à nous :
- « De COP en COP, le diagnostic des scientifiques est de plus en plus alarmant » concernant notre terre. Et les populations les plus touchées par la raréfaction de l’eau et de la nourriture ou même de l’air respirable ne sont pas toujours celles qui ont le plus de responsabilités. Si une des réactions nécessaires passe par la loi et la fiscalité nationales et internationales, une autre réaction sera de questionner à nouveau l’idée que le bonheur passe par la consommation des « maîtres et possesseurs de la nature ». Par exemple, la question immédiate et directe pour nous du coût de l’énergie est certes très difficile mais serait une occasion de revoir l’usage et l’entretien des lieux où nous vivons, notamment en paroisse.
- Les guerres, si lointaines et si proches comme celle en Ukraine, et aussi les conflits moins médiatisés comme ce que vivent les femmes en Afghanistan ou en Iran, les populations au Mali, en Syrie, au Liban – et la liste serait longue – me rappellent l’importance de ce que nous vivons ici et maintenant en termes de solidarité, de démocratie, de respect même s’il reste toujours des (belles) marges de progressions. « Il faut sans doute revisiter l’idée de nation, sans sombrer dans un nationalisme étriqué. La nation n’est pas nécessairement limitée à un pays… Elle est une manière d’affirmer, d’une part, la nécessité de vivre ensemble, et d’autre part la prise en compte de la situation de chacun. Elle peut, et elle doit, conjuguer singularité et communauté, local et universel » (Réforme 02/11 /2022)
- Une responsabilité dans la participation au débat public. Nous sommes en Alsace-Moselle parmi les représentants et les acteurs d’une laïcité ouverte qui se vit de manière forte au cœur de l’Europe : à ce titre, nos contributions aux débats publics sont attendues et écoutées, car notre manière de poser les questions, de percevoir les enjeux, d’articuler notre foi et notre éthique avec les défis de société, permettent de contribuer et d’enrichir les débats.
Dans les prochains temps, nous aurons à être présents à nouveau sur le débat tels que la fin de vie et sans doute la question de l’avortement. Et nous savons que notre protestantisme est particulièrement sensible aux questions des droits de la femme, de la crise écologique et de la construction de l’Europe à nouveau en conflit.