L’Europe a-t-elle besoin des religions ?
Christian Albecker, président de l’Union des Églises protestantes d’Alsace et de Lorraine, a accueilli une assemblée nombreuse au Parlement européen à Strasbourg. C’est à l’occasion d’une table-ronde européenne, organisée par l’UEPAL ce jeudi 5 octobre 2023, sur le thème « L’Europe a-t-elle besoin des religions ? » que se sont retrouvées plus de 150 personnes dans le bâtiment Louise Weiss.
La table ronde réunissait :
- Dorothée Wüst, présidente de l’Église protestante du Palatinat,
- Anne-Laure Zwilling, anthropologue des religions,
- Tamas Fabiny, évêque luthérien hongrois et vice-président de la Fédération luthérienne mondiale.
Anne Françoise Weber, journaliste à Berlin, en a assuré la modération avec brio.
Anne-Laure Zwilling, ingénieure de recherche au CNRS, anthropologue des religions, a présenté un état des lieux sur « Europe contemporaine et religions : dynamiques, enjeux, défis ». Elle a noté que « dans une Europe en rapide évolution, l’héritage du passé et l’émotion religieuse conservent leur importance ». Elle a ajouté : « L’attachement à la religion relevant plus d’un choix personnel que d’une obligation, il est souvent lié à des convictions identitaires fortes ». Et « dans le même temps, il y a « moins de religion » car la baisse numérique des affiliations s’accompagne de la perte d’influence et de crédibilité des grandes institutions religieuses comme d’ailleurs de toutes les institutions, étatiques, gouvernementales ». Son exposé a captivé l’hémicycle et pour entamer sa conclusion elle a indiqué : « Pour répondre à la question « l’Europe a-t-elle besoin des religions ? », il me semble qu’une réponse pourrait être qu’en tout cas elle ne pourra pas ne pas les prendre en compte », même si « la façon dont les religions peuvent être prises en compte et être partie prenante du futur de l’Europe n’est pas évidente ». Prenez connaissance de sa présentation
L’état des lieux d’Anne-Laure Zwilling a ensuite permis les échanges entre les participants à la table-ronde.
Les Églises chrétiennes en Europe doivent être « porteuses d’espoir » dans un monde de plus en plus complexe, a déclaré Dorothée Wüst. « Face aux défis tels que la guerre, le changement climatique et la crise de la démocratie, les Églises ne doivent pas se laisser aller à une ambiance générale de fin du monde », a-t-elle ajouté.
Face à la montée de la xénophobie et du nationalisme en Europe, Dorothée Wüst a demandé à ce que les Églises fassent entendre leur voix lorsque la religion est utilisée à des fins politiques.
L’Évêque luthérien de Hongrie, Tamás Fabiny a appelé les Églises d’Europe à montrer « l’exemple en matière de préservation des valeurs démocratiques ». Les gens sont de plus en plus indifférents aux Églises et à leur message parce qu’elles pensent que celles-ci se laissent accaparer par la politique, a déclaré Fabiny, qui est également vice-président de la Fédération luthérienne mondiale pour l’Europe centrale et orientale. La sécularisation gagne du terrain partout en Europe et dans le monde. Dans son pays, le débat s’est souvent focalisé sur la « Hongrie chrétienne ». Cette qualification est abusive : on peut dire qu’il y a des chrétiens en Hongrie comme des croyants d’autres religions ou des personnes sans religion. Dans cette évolution qui touche toute l’Europe, les religions doivent faire entendre leur voix comme contribution aux débats de société, en particulier en matière éthique et sociale.
À l’issue de la rencontre, un verre de l’amitié a permis de poursuivre les échanges.
Photos © UEPAL