Croire, mais pas en n’importe quel Dieu
Le Dieu en qui les chrétiens placent leur foi n’est pas n’importe quel Dieu. Il est pour eux celui qui a créé le monde, qui a ménagé un espace et donné du temps pour autre que lui. Il est celui qui a pris chair dans un homme pour manifester que, si les hommes peuvent se détourner mille fois de Dieu, ils ne peuvent empêcher Dieu de se retourner mille et une fois vers eux. Il est celui qui rendra le monde conforme à son projet : être un lieu où chacun, enfin, aura sa place.
L’Écriture, témoin de la Parole Dieu
C’est en ce Dieu que les chrétiens croient, parce que c’est à lui que la Bible (ou l’Écriture) rend témoignage. Elle relate la manière dont il s’est donné à connaître : à un peuple particulier d’abord, le peuple d’Israël, puis à travers un membre de ce peuple, Jésus de Nazareth. La foi chrétienne discerne en Jésus le visage humain de Dieu. Ce visage n’est pas un masque : Dieu ne se déguise pas en homme, il devient homme et se donne à connaître dans la vie et le destin de Jésus comme un Dieu infiniment plus humain qu’aucun homme ne pourra jamais l’être. En lui, Dieu s’exprime pleinement. Tout ce qui est dit de Dieu dans l’Écriture et tout ce que l’Écriture fait dire à Dieu trouve son sens plénier dans la personne de Jésus confessé comme le Christ. C’est pourquoi certains auteurs du Nouveau Testament parlent du Christ comme de la Parole de Dieu.
Au commencement était la Parole, et la Parole était tournée vers Dieu, et la Parole était Dieu.
La Bible, Évangile selon Jean 1, 1
L’Écriture, distincte de la Parole de Dieu
La plupart des Églises chrétiennes distingue, de nos jours, le texte biblique et la Parole de Dieu. Le témoin (l’Écriture) ne se confond pas avec ce dont il témoigne (la Parole, sur laquelle personne ne peut faire main basse). Dieu seul parle bien de Dieu : il est toujours plus Dieu que ce qu’une parole humaine (fût-elle biblique) pourra jamais en dire. Dieu seul est Dieu : on ne saurait dire que l’on « croit » en l’Écriture comme on croit en Dieu. Il serait vain, ainsi, d’imaginer que la Bible fournit le dernier mot sur toutes choses et qu’elle constitue un livre de science, un traité historique ou un code moral. En toutes choses, le fin mot n’appartient qu’à Dieu.
L’Écriture, seule autorité
L’Écriture constitue ainsi le texte de référence en matière de foi et le critère par lequel sont jugés l’enseignement et l’action de l’Église. Les Églises de la Réforme vont jusqu’à dire que la Bible jouit dans ce domaine, et dans ce domaine seulement, de l’autorité suprême. Dieu, qui prend ultimement la parole en Jésus Christ, se donne à connaître par l’Écriture seule. Tel est le sens de « sola Scriptura ».
Après avoir, à bien des reprises et de bien des manières, parlé autrefois aux pères par les prophètes, Dieu, en la période finale où nous sommes, nous a parlé à nous par un Fils qu’il a établi héritier de tout, par qui aussi il a créé les mondes.
La Bible, lettre aux Hébreux 1, 1-2
Elles ajoutent que l’Écriture est suffisante et qu’elle est sa propre interprète :
- La Bible suffit à la connaissance de Dieu. Aucune doctrine, aucune pratique héritée de la tradition de l’Église dépourvue d’appui dans l’Écriture ne peut être considérée comme un complément indispensable à son témoignage.
- Le principe d’interprétation théologique de la Bible est fourni par la Bible elle-même. Dans la mesure où elle témoigne du Dieu qui a pris la parole en Jésus de manière décisive, l’Écriture dans son ensemble est interprétée à partir de lui. Nul besoin de recourir à une instance extérieure. Les protestants ne nient pas que l’Écriture attende d’être interprétée en Église : c’est ce que font les confessions de foi. L’autorité de celles-ci ne tient toutefois pas à la position hiérarchique de leurs rédacteurs mais au fait que les communautés ecclésiales les reconnaissent comme une explicitation authentique du témoignage que la Bible rend à Dieu.