JS. Bach Aria « Ich folge dir gleichfalls »
(Passion selon Saint Jean)
« Excellent, mais dans un style mondain », » C’est un truc superficiel qui brise la structure « … : cet air si léger, si joyeux a pu susciter des commentaires amers chez certains musicologues, interloqués par cette irruption lumineuse au cœur du drame illustré par la Passion selon Saint Jean de JS. Bach.
En effet, le présent air est placé dans la scène de la comparution devant le grand-prêtre Hanne annonçant déjà la condamnation à mort de Jésus. Un bref récit de l’Évangéliste prépare l’air en rapportant laconiquement : « Simon-Pierre et un autre disciple avaient suivi Jésus » (Jean 18,15).
L’air débute avec les 2 traversos (ou flûtes traversières baroques) qui déploient leurs volutes insouciantes sur un rythme proche du menuet. À l’entrée de la soprano, la voix de l’âme croyante, basse instrumentale, voix et flûtes se suivent en canon illustrant magnifiquement le texte » Je te suis, moi aussi… ». La ligne musicale, radieuse, aboutit à « Ma lumière, ma vie ». La partie B de l’air, loin de proposer un contraste, voire une antithèse, exalte encore davantage le désir de suivre Jésus.
Lorsque la Passion selon Saint Jean de JS. Bach est comprise comme une prédication en musique pour l’édification des auditeurs de son temps, le caractère et la place de cet air dans l’œuvre entière n’apparaît plus du tout comme futile ou déplacé. En effet, selon Luther, la Passion du Christ « s’est accomplie premièrement pour nous libérer et deuxièmement afin que nous suivions le Christ ». Et c’est bien cette fonction libératrice de la mort du Christ qui est mise en évidence ici, suivie de l’appel à se mettre dans ses pas. Le texte écrit en « je » (Ich) met l’accent sur la volonté du croyant de suivre le Christ et de faire fructifier la grâce reçue dans la vie et dans la lumière.
À écouter, à voir :
Marie Perbost – « Ich folge dir gleichfalls », Johannespassion BWV 245, J. S. Bach
A Ich folge dir gleichfalls
Mit freudigen Schritten
Und lasse dich nicht,
Mein Leben, mein Licht.
B Befördre den Lauf
Und höre nicht auf,
Selbst an mir zu ziehen,
Zu schieben, zu bitten.
A Je te suis, moi aussi,
d’un pas joyeux,
et je ne quitte pas,
ma vie, ma lumière.
B Hâte ma marche,
et n’aie de cesse
de me tirer,
de me pousser, de me prier !
